La supercherie du mariage pour tous

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Je pense que deux personnes de même sexe doivent avoir le droit de s’unir, au même titre et avec les mêmes droits qu’un couple de personnes de sexe opposé marié. Mais il est fallacieux de vouloir faire croire que deux personnes de même sexe c’est la même chose que deux personnes de sexe opposé. Je ne cherche pas à porter ici un jugement de valeur. Deux personnes du même sexe peuvent absolument s’aimer ou faire l’amour. Mais dire que c’est la même chose, c’est nier la différence entre un homme et une femme. Il est essentiel d’appeler un chat un chat, d’accepter et de respecter le droit à la différence, d’arrêter de vouloir systématiquement renier la réalité.

L’union de deux personnes de même sexe est-elle normale (la norme désigne un état habituellement répandu) ? Cela dépend des sociétés et des époques. Aujourd’hui en France, c’est le couple de deux personnes du sexe opposé qui constitue la norme. Ici encore, je ne porte pas un jugement de valeur. La norme ce n’est pas bien ou mal en soit. Einstein et Usain Bolt ne sont pas des personnes normales.
L’union de deux personnes de même sexe est-elle naturelle (dans le sens qui est relatif à la nature) ? Non. Elle ne l’est pas. Encore une fois, je ne porte pas un jugement de valeur. La loi du plus fort est naturelle. L’aide aux personnes handicapées ne l’est pas. Le fait qu’une chose soit naturelle ne la rend pas bonne ou mauvaise.

Le mariage est le mode d’organisation de la conjugalité le plus ancien et le plus universel qui encadre les règles de fonctionnement du couple pour fournir un cadre social et légal propice au développement de la famille.
Le mariage ne se résume pas à consacrer l’amour mutuel entre deux personnes. Il y a même eu des époques, et c’est encore parfois le cas aujourd’hui, où ce second aspect du mariage est complètement secondaire.

Je pense que deux personnes de même sexe doivent avoir le droit de s’unir, au même titre et avec les mêmes droits qu’un couple de personnes de sexe opposé marié (Le PACS ne le permet actuellement pas). Il faudrait simplement trouver de nouveaux termes et un nouveau cadre pour cette nouvelle union. Paire plutôt que couple, union plutôt que mariage par exemple. Le mariage garderait ainsi son sens sur lequel cette nouvelle union pourrait s’appuyer.

Pourquoi le mariage pour tous est-il une supercherie ? L’appellation de mariage pour tous est tout simplement impropre, puisqu’il s’agit uniquement d’ouvrir la possibilité de se marier à deux personnes de même sexe et pas à trois personnes ou à un père et sa fille. Justement pourquoi pas 3 personnes ? Simplement parce que le mariage était le rapprochement d’un homme et d’une femme, parce qu’il faut un homme et une femme pour engendrer. Pourquoi pas un père et sa fille ? Pour éviter les problèmes de consanguinité. Comment l’union de deux personnes de même sexe pourrait-elle suivre les mêmes contraintes ? En étant établie sur le modèle ancestral du mariage.

Aujourd’hui, ce modèle n’existe plus dans la loi. Nous utilisons le même terme pour désigner et encadrer ces deux rapprochements distincts : celui de deux personnes du sexe opposé et celui de deux personnes du même sexe (nous restons ici dans la supercherie). Le sens originel du mariage n’existe plus que dans la mémoire, c’est à dire plus pour longtemps. Ceux qui revendiquaient le droit au mariage pour deux personnes de même sexe ont gagné… et ont perdu en même temps car le concept qu’ils revendiquaient n’existe plus. Dans ce nouveau cadre, je ne vois aucune raison d’empêcher un père et sa fille de se marier et d’adopter. Au non de quoi seraient-ils moins légitimes que deux personnes du même sexe ? Et pourquoi pas trois ? L’appellation de mariage pour tous deviendrait ainsi adéquat. Je pense que nous y arriverons car la position intermédiaire actuelle ne me paraît plus tenable sans le modèle originel du couple hétérosexuel comme référant.

L’avenir nous dira si cette évolution était une bonne idée. Dans tous les cas, elle n’est ni triviale ni anodine. Elle aurait au moins mérité un vrai débat, comme celui sur le traité établissant une Constitution pour l’Europe. J’aurai aimé entendre ce que des spécialistes avaient à en dire, comme des philosophes, des sociologues, des ethnologues, des anthropologues. Il est vraiment dommage que l’on ai réduit tout cela à un vulgaire clivage sur l’homophobie.

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3 Responses to La supercherie du mariage pour tous

  1. RH

    En tant que spécialiste UML vous auriez pu faire une analogie sur ce sujet.
    Modifier le sens du mot mariage ne modifie pas le modèle de notre société mais son métamodèle.
    Imaginez que du jour au lendemain l’OMG déclare qu’en UML une flèche simple signifie aussi bien association qu’héritage…!

    Mais ceci est bien sûr impossible: le fonctionnement de l’OMG est démocratique, lui.
    Changer le sens d’un mot par la force de la loi est la mesure la plus dictatoriale qui puisse se concevoir.

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    • Alexandre Courvoisier

      Curieusement, c’est le second paragraphe que j’ai le moins bien compris, RH. Le fonctionnement démocratique de quelque chose ne préjuge aucunement au présent de ce qu’il adviendra dans le futur.

      Ensuite, changer le sens d’un mot par la loi et la force de celle-ci ne signifie pas que la loi est anti-démocratique ou dictatoriale; cette opération peut tout à fait être une mesure démagogique, d’ailleurs – d’autant qu’il ne s’agit ici que d’une possibilité offerte, et non d’une contrainte (comme on l’entend sous dictat).

      Concernant le premier paragraphe, je me questionne. Vous semblez réduire « sens » à « flèche ». Schématiquement, ce n’est pas faux. Je me suis dit que c’était les constituants qui étaient la cause, et non le conteneur. Mais en supposant qu’analogie soit raison, est-ce que le conteneur est isolé du contenu ? Et d’autant plus, je me demande si un méta-modèle est isolé des modèles qui le respectent. Ca me semble évidemment faux. Bien plus, en changeant un méta-modèle, on risque de changer instantanément tous ses modèles correspondants, ou une grande majorité d’entre eux.

      En math, quand on passe d’un certain ensemble à un autre, on change certainement les éléments constitutifs.

      Et puis si c’est de la modélisation, n’oublions pas qu’on n’a pas fait que modifier une flèche.

      C’est tous les composants candidats à la relation qui sont susceptibles de changer. Si seule une corde suffit à joindre deux personnes, pourquoi est-ce qu’on placerait deux personnes aux extrémités (elles y sont déjà, puisque la corde suffit) ?

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  2. Alexandre Courvoisier

    Monsieur Audibert,

    Je dois dire que je n’ai pas très bien compris: « Ceux qui revendiquaient le droit au mariage pour deux personnes de même sexe ont gagné… et ont perdu en même temps car le concept qu’ils revendiquaient n’existe plus. »

    Par contre, il m’arrive de penser à propos de: « L’avenir nous dira si cette évolution était une bonne idée. » Une fois, une personne a dit à une autre au journal télévisé français, en faveur du changement de loi: « Faut évoluer! » – j’ai dit à ma mère qu’ils ne risquaient pas d’évoluer très longtemps (à cause de la biologie).

    À propos des débats. J’essaie d’imaginer ce qu’auraient dit:
    -un sociologue: « baisse de la natalité », un ethnologue: « ça existe déjà quelque part et ils n’en sont pas morts », un anthropologue: « c’est contre-nature ».

    Mais pour revenir au sérieux, débat il y a eu. Au journal, une Grande Philosophe a fait une pendule pour conclure « C’est quoi contre-nature ? ». J’avais envie de lui répondre: étudier 5 ans la philosophie, et dire qu’on n’a pas d’idée.

    Enfin, je vous rejoins, Monsieur Audibert, sur la différence. Un débat télévisé très sérieux a eu lieu. L’élément en cause n’était pas le débat, mais le phénomène selon lequel il est tombé dans l’oreille d’un sourd (il fallait du changement).

    Un ecclésiastique a posé la question qui tue à une personne favorable au mariage pour les personnes de même sexe; cet ecclésiastique a répondu: « Si un homme et une femme sont pareils, pourquoi prôner la parité ? ».

    Je crois que cela résume toutes les réponses que l’on peut trouver, et que ça met un point au débat.

    Soit un homme et une femme sont pareils et chercher la parité des représentations ou des salaires est une berlue, soit ils sont différents et le mariage des personnes de même sexe n’a aucun fondement.

    N.B.: J’ai cherché dans les réflexions le thème de la logique.
    Vous mentionniez qu’il s’agit de savoir à quel domaine s’appliquait une logique. Pour ma part, les prédicats du deuxième ordre me dépassent, mais j’essaie d’appliquer la logique « classique » le plus possible. Toutefois, une personne m’a répondu – et j’en ai convenu – que la logique ne parlait essentiellement que d’elle-même.
    Oui, si les maths sont du formalisme, et si la philosophie est de la vie, savoir à quoi s’applique la logique pourrait faire intervenir les deux. Mais n’est-ce pas le domaine auquel la logique est susceptible de s’appliquer, qui – finalement – doit en décider (tout comme le client juge le résultat de l’informaticien)? Finalement, je me dis que la logique n’est qu’un formalisme dans les maths, et que – oui – elle ne saurait parler que d’elle-même, dans l’absolu. La personne a aussi évoqué les logiques modales, en disant que ça revenait à faire une carte à l’échelle 1:1 de notre monde, et que c’était donc imbécile de le faire. Je n’en suis pas si sûr. Je pense qu’il s’agirait d’une unification du raisonnement et de la mémoire, dans le cas où les logiques modales peuvent être écrites. Voilà, je voulais vous faire part de ce dernier paragraphe. Je n’ai pas trouvé de meilleurs endroit que « réflexions » pour cela.

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